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Interviews

Cet hiver, l’actualité de Régis Loisel s’annonce chargée. Le tome V de Peter Pan ? Pas pour tout de suite… Alors, juste histoire d’en parler, il a bien voulu répondre à nos questions, même les plus indiscrètes…Paru l’an dernier, Pyrénée était votre premier album de scénariste. Avec Franfreluche, on peut désormais parler de tournant.Vous savez, j’ai toujours raconté et dessiné des histoires. Les collaborations avec Le Tendre (ou Cothias dans les années soixante-dix) ont toujours été faites à deux sur le plan du scénario. Mais il est vrai que depuis quelque temps, certains dessinateurs me demandent de leur écrire des histoires… alors par jeu, je deviens leur scénariste. Les pauvres ! Ils ne savent pas où ils mettent les pieds !La collaboration a été difficile ?En racontant mes histoires, j’ai eu du mal à ne pas avoir mon point de vue de dessinateur. Un petit croquis vaut mieux qu’un long discours alors je “story-board” et mets en scène toute l’histoire. Pour moi cela va plus vite mais cela ne doit pas être évident pour le dessinateur. J’en suis conscient. Cela se fait dans la difficulté pour eux comme pour moi. Je les pousse à aller très loin.Pour qu’il fasse du Loisel ?Non, j’ai envie qu’ils dépassent leurs limites. Je suis ouvert à toutes leurs propositions à partir du moment où elles servent l’histoire. Je ne veux surtout pas d’un résultat en deçà de ce que j’aurais fait moi-même. C’est d’ailleurs pour cette raison que je fais les story-boards. Mes histoires sont toutes en demi-teinte, la mise en scène est là pour épaissir le propos. Prenez l’exemple de Pyrénée : il n’y a pas d’aventure, seulement des ambiances. d’où l’importance de la mise en scène si rigoureuse.Pyrénée était un vieux projet ressorti de vos tiroirs. Le cas de Fanfreluche est différent, non ?Oui puisque je l’ai écrit spécialement pour Christine Oudot.Une comédie à la Loisel, cela donne quel genre d’histoire ?C’est davantage une histoire pleine de quiproquos, de rebondissements et de situations cocasses. Evidemment, on n’éclate pas de rire, ce n’est pas le propos. C’est l’histoire d’une poissonnière très laide qui, par hasard, se trouve en possession d’un pendentif maléfique à l’effigie d’une sirène. A partir de là, tous les hommes vont tomber sous le charme de la laide poissonnière…Le rêve !…Oui, sauf qu’ils vont tous en mourir. Yolande va donc traverser cette histoire avec la plus grande naïveté… Bref, 94 pages de bonheur.La collaboration vous demande beaucoup d’énergie ?Bien sûr. Un story-board n’est pas une mince affaire. J’adore ça mais il est vrai que Pyrénée et Fanfreluche n’ont pas été faits dans des conditions idéales : dans le même temps j’ai réalisé La Quête avec le Tendre et Lidwine, le quatrième tome de Peter Pan et le story-board du cinquième…On peut espérer le lire dans combien de temps ?Je pense qu’il sortira fin 2000. C’est un énorme travail puisqu’il fera 90 pages. J’ai enfin pu commencer à le dessiner en septembre dernier.Vous ressortez Norbert le lézard.Effectivement. Nobert est une bande dessinée que nous avions faite avec Cothias et moi-même dans le journal Plop en 1976-1977. C’est une BD animalière humoristique tout public avec des personnages hauts en couleur, sournois, vils, sympathiques, assez cons… attachants quoi ! Mon fils Blaise est en train de la relooker avec de nouvelles couleurs. Paradoxalement, c’est au travers de cette BD. que j’ai trouvé mon style d’encrage. Et malgré ses faiblesses, c’est sûrement ce que j’ai fait de mieux en matière de BD. Avec La Dernière Goutte, ce sont mes deux chefs-d’œuvre !!! Ça sortira chez Granit Associés pour Angoulême.Le succès de vos précédents albums est-il un poids pour vous ?Ce n’est pas véritablement un poids. Je suis très exigeant et je refuse de mettre mon nom sur un album si je ne suis pas en accord avec le résultat. Je sais que mon nom est vendeur et je ne veux pas abuser les lecteurs. En un mot, je suis un chieur et je déconseille aux autres de travailler avec moi !On vous prête ces dernières années un tas d’aventures extra-BD.C’est tout à fait vrai. J’ai travaillé un temps pour les studios Disney sur le film Mulan et sur un projet futur, Atlantis. Actuellement je travaille sur un jeu vidéo pour la société Cryio. C’est nouveau pour moi, c’est d’ailleurs pour cela que j’ai accepté. Je travaille également sur un projet de film du Petit Poucet. Si cela se monte, il se pourrait que je sois une sorte de conseiller-artistique.Vous allez devenir un spécialiste des adaptateurs de contes traditionnels !C’est sûrement vrai. C’est mon côté “disneyen” qui ressort ! J’aimerais adapter Pinocchio, Le Chaperon Rouge, Le Petit Poucet…Cela fait longtemps que vous avez envie de faire du cinéma.Comme tous les dessinateurs, je crois. J’ai accepté ce projet du Petit Poucet pour ne pas laisser passer l’opportunité. Et pourtant, il tombe juste au moment où je commence Peter Pan ! Je suis très curieux de découvrir cet univers-là. Je fonctionne très souvent par la curiosité et l’envie d’explorer des terres inconnues. J’aime beaucoup la BD mais je ne me vois pas ne faire que ça toute ma vie. J’ai aussi des projets de livres.Comme celui à paraître chez Glénat-Beaux Livres ?Entre autres oui. Celui-ci est un carnet de voyage. Je suis allé en Afrique en mai dernier avec Patrick Cothias et Yvon Lecorre, artiste-peintre, sous le couvert d’une mission humanitaire. Nous avons eu pour objectif de jeter sur le papier nos impressions sur le pays. Un livre rassemblant nos travaux est en préparation chez Glénat.C’est un nouvel exercice de style.Oui, et cela n’a pas été si évident d’ailleurs. Il fallait saisir sur le vif des impressions, des expressions, des moments… Il faut travailler très vite. Cette parenthèse ne venait pas d’une envie furieuse. J’ai simplement saisi une opportunité.On vous propose 1 000 projets. cela doit être terriblement excitant ?Bien sûr. Il y a tant de choses que je n’aborderai jamais… Ceci dit, j’en rêve seulement car je suis assez fainéant…Vous êtes souvent sollicité ?Un peu trop à mon goût… Cela va de la simple demande de dédicace à des invitations dans les festivals, des interviews, des demandes de collaboration… Ce ne sont malheureusement pas toujours des choses passionnantes !Quand on est Régis Loisel, c’est facile de garder la tête froide ?Oui, forcément ! Pour qui je pourrais bien me prendre ? Par contre, on dit souvent que je suis bourru. Je ne pense pas l’être. Face à toutes ces sollicitations, je dois faire des choix. Et forcément, ceux à qui je dis non sont déçus. Lorsqu’ils insistent trop, il faut bien que je sois ferme. D’où cette réputation. Mais ceux qui me connaissent savent bien que je ne suis pas un type bourru.On vous flatte ?Je ne suis pas dupe. Je sais très bien les enjeux que représente mon nom dans le milieu de la BD. Je n’ai pas envie de rentrer dans le jeu. Je ne retiens que l’intérêt des propositions.On connaît moins votre côté éditeur.Nous avons créé avec quelques copains les éditions du Granit. Nous produisons des affiches, des cartes postales et des tirages de luxe de nos BD. Je ne suis qu’un élément créatif dans cette entreprise. J’ai envie de profiter de l’existence de cette structure pour sortir des livres plus personnels. Le but est de nous faire plaisir. Les auteurs de BD ont bien souvent des aspirations extra-BD. Pourquoi ne pas sortir le luxe de les éditer ?Dans une interview pour La Lettre, il y a deux ans, vous disiez qu’après Peter Pan vous raconteriez une histoire d’amour. Qu’en dites-vous aujourd’hui ?Que l’amour est tenace !CF & BPY

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